Cuisiner à l’ancienne #5: le fer, le culottage et le nettoyage sans eau



Dernier épisode (enfin !) de la saga à rebondissements sur les matériaux de cuisson à l’ancienne où je vais aborder comment utiliser et entretenir les ustensiles en fer. Ils se divisent en deux catégories : la fonte de fer et la tôle d’acier. Pour les raisons évoquées dans le premier billet « Cuisiner à l’ancienne #1 : Pourquoi c’est mieux », je ne parlerai ici que de fer non émaillé et sans revêtement.

S’il faut retenir une chose concernant les ustensiles en fer c’est qu’ils n’aiment pas l’eau car ils s’oxydent – rouillent - facilement. Il faut donc toujours bien les sécher. Et puis ça va toujours mieux en le disant : on ne passe pas d’ustensiles en fonte ou en fer au lave-vaisselle !
Autre chose : toujours à cause de l'oxydation, il faut éviter de conserver des aliments à l’intérieur d'ustensiles en fer (ton reste de daube sera bien mieux dans une casserole en inox pour attendre son réchauffage jusqu’à demain !).


1 - La fonte de fer
pour la cocotte, les poêles-grill
 
Qu’est-ce que c’est ?
C’est un mélange de fer + carbone. On trouve la fonte émaillée, la plus courante, pratique car peu adhésive, mais l’émail s’abime avec le temps et il faut parfois faire ré-émailler ses ustensiles. Noter aussi que le plomb (toxique) est parfois utilisé car il facilite l’application de l’émail, il est donc intéressant de se renseigner sur ce point auprès du fabriquant avant l’achat. Je conseille plutôt de choisir de la fonte brute non émaillée, ce que j’ai fait : elle est inusable, se culotte au fil du temps et rehausse la saveur des aliments. 

Pour quoi faire ?
La fonte emmagasine la chaleur lentement et la restitue petit à petit longuement. Si elle n’est pas adaptée pour faire bouillir de grandes quantités de liquide (ça prendrait beaucoup de temps), c’est un matériau parfait pour les cuissons longues, douces et homogènes et pour les plats mijotés. Pour ne pas que les ingrédients attachent, il ne faut pas chauffer sa cocote trop fort. La préchauffer à feu doux avant d’y déposer les aliments qui vont cuire en douceur sans se dessécher. Monter le feu progressivement en fin de cuisson pour dorer – pour les pommes de terre par exemple.
On peut aussi saisir des aliments dans une poêle-grill spéciale dont la surface est rainurée. Il faut pour cela la laisser chauffer un moment à feu pas trop fort pour qu’elle emmagasine la chaleur, puis monter le feu avant de déposer la viande par exemple.


Comment l’entretenir ?
Si un plat mijoté a un peu attaché au fond de la cocotte, commence par frotter avec un peu de gros sel pour enlever les résidus puis passe-la à l’eau chaude sans détergent. Attention, la fonte de fer rouille ! Pour éviter cela il faut absolument la sécher immédiatement et soigneusement avec un torchon bien sec, voire la passer ensuite une minute sur feu doux pour éliminer toute humidité. Ensuite, étale une fine pellicule d’huile à l’intérieur pour patiner et protéger encore de l’humidité, essuie avec une feuille d’essuie-tout.
Si la fonte a rouillé (ou que tu as récupéré une vieille cocotte de ta grand-mère), pas de panique, ce n’est pas toxique ! Commence par ôter la rouille avec une paille de fer, puis continue avec du gros sel et du citron, pour finir avec un peu d’huile.
Le culottage : avec les utilisations, l’intérieur de la cocotte va se patiner d’une couche noire. La fonte étant noire à la base, tu ne le verras même pas. C’est normal et même souhaitable, il s’agit du culottage qui va rendre ta cocotte naturellement antiadhésive. 





2 - La tôle d’acier
Pour les poêles
 

Qu’est-ce que c’est ?
Alliage de fer à 99% + carbone pour améliorer la solidité. C’est un matériau solide et sain. À choisir sans revêtement évidemment, et à fond épais pour que la poêle ne gondole pas même chauffée à haute température. Une épaisseur de la tôle de 3 mm constitue un ustensile très solide et indéformable. S’utilise sur tous les feux, l’induction, et même au four si la poignée est détachable ou intégralement en fer.
Pour quoi faire ?
La poêle en acier est optimale pour griller et saisir, c’est-à-dire pour créer une belle réaction de Maillard comme avec une poêle en inox. Quand une poêle est bien culottée, le fond devient lisse et glissant comme une patinoire, si si, testé et vérifié ! On peut tout à fait y faire cuire des crêpes (mais pas les faire sauter vu le poids de la bête^^) ou des œufs au plat,  et les faire glisser intacts dans l’assiette. Cela nécessite tout de même un peu de matière grasse.
Comment l’entretenir ?
Je lai déjà dit, les ustensiles en fer n’aiment pas l’eau car ils rouillent. Il faut donc les sécher très soigneusement après les avoir lavés, voire ne pas les mouiller du tout. C’est pourquoi le nettoyage des poêles en fer est particulier et peut surprendre car dans l’idéal, on les nettoie sans produit vaisselle, sans éponge… et même sans eau !
En fait, c’est beaucoup plus facile, économique et rapide que le nettoyage de poêles classique : pour une poêle bien cra-cra (exemple : cuisson d’entrecôte avec des petits oignons et champignons, déglaçage à la crème) il suffit de deux feuilles d’essuie-tout + une cuillère de sel + quelques gouttes d’huile et 2 minutes chrono. Comment accomplir un tel prodige ?
1 – Débarrasse la poêle du maximum de son contenu.
2 – Saupoudre d’une cuillère de sel fin, voire de gros sel si ça a beaucoup attaché.
3 – Frotte avec l’essuie-tout partout dans la poêle, en insistant tant que tu sens des parties rugueuses. Tu peux y aller, aucun risque de la rayer ! Au bout d’une minute le papier glisse facilement sur le fond de la poêle, le sel a abrasé les impuretés, il est devenu noir et graisseux, et s’est aggloméré en petits tas : il est temps de le jeter. Essuie très soigneusement la poêle avec une feuille de papier propre pour éliminer les derniers résidus et grains de sel. Attention : le but n’est pas d’ôter la couche noire du culottage mais seulement les résidus d’aliments.
4 – Passe la poêle sous l’eau bien chaude et sèche-la soigneusement. Cette étape est facultative, je ne le fais pas à chaque fois pour ma part.
5 – Étale une goute d’huile avec un chiffon propre. Cela la protège naturellement contre l’oxydation et améliore le culottage.

C’est sûr que c’est hygiénique cette affaire ? oui, même sans utiliser de détergent, car l’ustensile est automatiquement stérilisé lorsqu’il est chauffé à haute température. On ne risque pas non plus d’ingurgiter de vieilles graisses recuites, car après avoir bien nettoyé une poêle on la badigeonne d’huile propre et neuve.
Mais les odeurs ? Le culottage ne garde pas les odeurs, tu peux tout à fait faire cuire du saumon, bien nettoyer ta poêle et préparer de lendemain des crêpes, elle ne sentira pas du tout le poisson et ne donnera aucun goût à tes autres préparations.





Le culottage 



C’est une technique qui surprend au début, habitués que nous sommes à récurer, gratter, briquer nos ustensiles pour les rendre étincelants et comme neufs. Alors que culotter une poêle ou une cocotte, c’est au contraire créer l’intérieur, au fur et à mesure des utilisations, une pellicule bien noire, lisse et luisante comme si elle était vernie. Plus c’est noir, plus ce sera antiadhérent !

Tu peux voir sur la photo ci-dessus mes poêles en fer peu de temps après leur achat : la petite est encore neuve, la grande a été utilisée quelques fois, des traces brunes commencent à apparaître. La moyenne sert souvent et commence à se culotter. Sur la photo suivante, on a une poêle bien culottée après quelques semaines d’utilisation régulière. Comme tu peux le voir, elle ne ressemble plus à un ustensile neuf mais elle est beaucoup plus agréable à utiliser car elle n’attache pas du tout ! 



Comment culotter une poêle ? Verse dans la poêle ½ verre d’huile (une huile 1er prix fait l’affaire). Fais chauffer à feu vif. Quand l’huile commence à fumer, jette-la et essuie la poêle avec un du papier essuie-tout sans la laver. Elle est déjà utilisable mais pas encore complètement culottée, le fond commence tout juste à présenter des taches brunes. C’est que qu’on cherchait, n’essaie pas de les nettoyer ! Il faudra répéter l'opération de l'huile plusieurs fois avant que l'intérieur finisse par être protégé et devienne complètement noir et antiadhérent. Cela se fera tout seul, petit à petit au fil des cuissons, patience ! La méthode la plus efficace que j’aie trouvée c’est de faire cuire des patates à feu doux dans un peu d’huile, pendant une bonne demi-heure (avec une branche de romarin, un peu de sel et un couvercle : trop bon !), la poêle noircit vite avec ce traitement.
Attention aux acides (tomate, citron, déglaçage au vinaigre, fruits acides…) qui ruinent en moins de deux un beau culottage patiemment accumulé sur plusieurs semaines. Je me suis fait avoir plusieurs fois, maintenant je fais mes sauces tomate à la casserole. C’est la seule limitation que je vois aux poêles en fer : si tu veux préparer un foie de veau déglacé au vinaigre de framboise (miam miam !), utilise plutôt une poêle en inox.


 



Cuisiner à l’ancienne #5 : le fer, le culottage et le nettoyage sans eau
 






Voila, la série d’articles sur les ustensiles de cuisson à l’ancienne est terminée ! J’espère qu’elle t’a intéressé et que ces conseils te seront utiles. Si tu as des suggestions pour les compléter ou les améliorer, de nouvelles astuces, des techniques à ajouter, n’hésite pas à t’exprimer. Promis, je ne serai (presque) pas vexée !
 


8 commentaires

  1. voici un article hyper intéressant et instructif! Merci beaucoup.

    RépondreSupprimer
  2. Très intéressant, on découvre des astuces de grands mères qui marchent parfaitement. On a rien inventé ;)

    RépondreSupprimer
  3. Tout à fait, rien que de neuf sous l'ampoule de la cuisine, mais on a tendance à oublier les vieilles recettes qui marchent si bien !

    RépondreSupprimer
  4. Très intéressant !
    Plus ça va, plus je regarde les ustensiles à la biocoop.
    Le problème c'est le prix ! Dur d'expliquer cela au ménestrel... Et s'il voit une poêle culottée je crois qu'il est bon pour la syncope ! (même moi, ça me choque, l'habitude avec les théières en fonte ou terre).

    RépondreSupprimer
  5. Je comprends , c'est vrai que cette affaire de culottage ça fait bizarre au début. Après s'est différent de voir une poêle noire en photo et d'en tenir une dans les mains : quand on la voit en vrai on se rend mieux compte que le noir n'est pas de la crasse mais plutôt une pellicule protectrice lisse et glissante.
    Si le culottage vous ennuie tu peux te rabattre sur une poêle en inox qui offre plein de possibilités aussi.

    RépondreSupprimer
  6. Merci pour ce topo super intéressant !

    RépondreSupprimer
  7. My pleasure ! Contente que ça t'ai intéressée !

    RépondreSupprimer