Si tu traines souvent tes bottes crottées par
ici Voyageur, j’imagine que comme moi tu attaches de l’importance à ce qui
entre dans ton assiette et dans ton estomac : tu choisis de bons produits
frais, de saison, locaux, bios aussi souvent que possible, tu utilises des
ingrédients complets et le moins transformés/raffinés possibles, tu fais des
expériences de l’extrême avec des laits végétaux et des farines de l’autre
monde… Mais à quoi bon choisir des aliments sains si c’est pour les cuire dans
des ustensiles qui les rendent toxiques ? Oui, à quoi bon ? Où courge ? Dans
quelle étagère (ranger ma nouvelle cocotte en fonte chérie) ?
(comment
appâter les lecteurs de Philosophie magazine)
J’ai hésité à te raconter ça mais c’est
important pour moi de t’expliquer pourquoi cette question me tient
particulièrement à cœur :
Il y a un peu plus d’un an, on a diagnostiqué à
mon Ensorceleur une maladie bien bien chiante et effrayante. Je ne t’en parle
pas pour nous faire plaindre : par chance le traitement par chimio a été extrêmement efficace, tout est rentré dans l’ordre et l’Ensorceleur a repris ses séries de
30 pompes et abdos matin et soir avec une énergie décuplée (ah ah, ne bavez pas
les filles, c’est mon mien !). On ne sait pas précisément ce qui a pu
causer la maladie, probablement divers facteurs environnementaux, ou la faute à
pas de chance… Mais ça m’a beaucoup fait réfléchir sur notre mode de vie en
général, sur notre mode d’alimentation et en particulier sur les ustensiles de
cuisson à revêtement antiadhésif courant, soupçonnés de présenter un risque
cancérigène.
Après une quantité de recherches et collecte de
documentation digne d’une thèse en médecine, j’ai fait du tri dans mes ustensiles
de cuisson.
J’ai
éjecté :
- les casseroles et poêles à revêtements PTFE
(ou Teflon) : d'après certaines études, le Téflon, inerte à froid,
commencerait à émettre des produits toxiques à 230°C. Selon l’Agence Française
de la Sécurité des Aliments (AFSSA), le Teflon ne serait pas dangereux tant
qu’il n’est pas rayé ou écaillé. Le problème viendrait du PFOA, une « colle » servant à faire
adhérer le revêtement à l’ustensile. Lui est reconnu cancérigène, mutagène, reprotoxique et autres joyeusetés, et peut migrer vers
les aliments lorsque le revêtement est abimé. Or je sais d’expérience que ce type de revêtement s’effrite vite,
au bout de quelques années pour les produits de meilleure qualité, voire de
quelques mois le plus souvent.
- les poêles à revêtements céramiques : elles
font débat car elles libèreraient des nanoparticules qui
soulèvent des inquiétudes sanitaires. D’un point de vue strictement pratique, après
avoir testé je n’ai pas été convaincue. Si les premières utilisations sont un
plaisir tant la surface est glissante, j’ai observé que ce revêtement s’abime vite à cause de la chaleur, pourtant je n’avais pas choisi du
premier prix et fait attention à ne pas le rayer. D’autre part,
l’utilisation de ces poêles est limitée car elles ne supportent que des
températures douces : impossible de saisir une
viande (qui va bouillir dans son jus plutôt que griller) ou de faire sauter des
légumes par exemple, ni de flamber son contenu… Bref, j’ai abandonné assez vite.
- les barquettes et le papier en aluminium,
matériau reconnu toxique pour l’Homme. Il ne faut pas le chauffer, ni le mettre
au contact d’aliments acides, voire ne pas le mettre du tout au contact des
aliments... Ben, dehors hein !
J’utilise
avec prudence :
- les moules et feuilles en silicone : Le silicone alimentaire est un mélange de
polymères de silicone avec un catalyseur : du platine ou du peroxyde. Les
deux sont autorisées en France. Le silicone platine reste inerte jusqu’à
250-300°. En revanche, le silicone peroxydé, moins cher, laisse migrer des
particules vers les aliments dès 160°C si sa fabrication n’a pas été faite
correctement. Pour une totale sécurité alimentaire, je te conseille de n’acheter
que des ustensiles clairement étiquetés « silicone platine », indiquant une
résistance à de hautes températures (250-260 °). Si tes moules dégagent une odeur en
chauffant, s’ils se tachent ou s’ils gardent une trace blanche quant on les
plie, c’est louche. Les miens sont clairement douteux, donc je ne m’en sers
plus qu’à froid, pour mouler de la glace par exemple ou pour monter des
entremets. Je suis très contente en revanche de mon tapis en silicone, trop
grand pour aller dans mon petit four mais très pratique pour étaler et pétrir des pâtes
à tarte ou à biscuits.
- les ustensiles émaillés : l’émail s’use avec le temps et il faut parfois
faire ré-émailler ses ustensiles. C’est surtout vrai pour les cocotes et les
casseroles allant sur le feu à cause du frottement des cuillères à l’intérieur.
Les moules et ramequins présentent rarement cet inconvénient. Noter aussi que
le plomb (toxique) est parfois utilisé car il facilite l’application de
l’émail, notamment pour les ustensiles fabriqués en Asie. Il est aussi intéressant
de se renseigner sur la manière dont l’émail est fixé et le type de colle
utilisé. Pour ma cocote j’ai préféré la fonte brute, et mes moules en
porcelaine sont de fabrication française.
- un plat à tarte et un moule à charnière
anti-adhésifs faute de connaitre des alternatives, mais je viens de trouver des conseils très intéressants sur le blog Videlice à ce sujet et vais les remplacer sous peu par des moules en acier.
J’ai
gardé :
Une batterie composée uniquement de matériaux
sans risques pour la santé et plus pratiques, et qui ressemble beaucoup à celle
de ma grand-mère : des casseroles en inox, une cocote en fonte brute, des
poêles en tôle d’acier brut, une bassine à confiture en cuivre, des plats en verre et en porcelaine.
Avantage n° 1 : c’est sain
Argument essentiel tu l’as compris. Les
casseroles en inox, les poêles en fer, les plats en verre sont des matériaux reconnus
comme sains et inertes : ils n’ont aucun revêtement susceptible de se faire la malle
pour aller zoner dans ton assiette.
Dans la partie précédente, j’ai écrit les
paragraphes sur la toxicité des revêtements au conditionnel. Je
planche sur cet article depuis plusieurs mois, dont de nombreuses heures de
recherches pour te donner des informations vérifiées et objectives sur la
toxicité (ou l’innocuité, je suis méfiante mais pas obtuse) des revêtements
anti adhésifs, et je n’ai trouvé aucune conclusion formelle sur le sujet, du
moins pas sur les sites sérieux et objectifs que j’ai privilégiés. La vérité c’est
qu’on n’a pas assez de recul ni d’études indépendantes sur le sujet pour en
tirer des conclusions : on ne sait pas.
Ce qui est certain en revanche, c’est la
parfaite innocuité des ustensiles « à l’ancienne ». Donc entre des
ustensiles qui ne sont peut-être pas
toxiques mais fortement soupçonnés de l’être et d’autres dont on est certain qu’ils
sont sains, le choix a été facile !
Avantage n° 2 : c’est économique
Même si ce n’est pas évident au premier abord car
à l’achat, ces ustensiles coûtent souvent plus cher. Par exemple, j’ai payé mon set de 3 casseroles en inox + la poignée amovible 115 €, le lot de 3 poêles
en fer pour 99€. J’ai choisi une marque réputée fabriquée en France, mais
on peut trouver mois cher et de bonne qualité dans des marques moins connues.
L’investissement devient vraiment intéressant sur
la durée : alors qu’on change des casseroles et poêles à revêtement
antiadhésif tous les 2 à 5 ans (expérience personnelle) parce que le revêtement
sus-cité est rayé (et perd donc son avantage anti adhésif), que le fond est
déformé etc., tes poêles en fer ou casseroles inox dureront… toute ta vie, eh
oui ! Ces matériaux ne craignent rien : on peut les chauffer fort, les
gratter… Une cocote en fonte est inusable, la mienne est garantie 25 ans. Bref,
l’investissement de départ est un peu plus élevé mais tu vois qu’on le rentabilise
vite.
Avantage n° 3 : C’est écologique
D’une part, ce sont des ustensiles faits de matériaux peu transformés et d’alliages simples. Dans leur composition,
on n’utilise pas de produits issus de l’industrie pétrochimique, et leur
fabrication requiert peu d’étapes.
Ensuite, leur composition simple en fait des objets facilement recyclables. Et de toutes façons, comme je te l’ai
expliqué juste avant (tu suis ?), ce sont des produits durables. On les
garde à vie, voire on les transmet à ses héritiers : on limite ainsi les
déchets et le gaspillage de ressources.
Grâce à leurs propriétés intéressantes de
conduction de la chaleur, ils chauffent vite et/ou restituent très bien la
chaleur, ce qui permet des économies d’énergie. Dans
la même logique : utiliser un couvercle pour faire chauffer de l’eau permet
d’économiser environs 50% d’énergie, que ce soit avec une casserole en inox ou
munie d’un revêtement.
Enfin, les ustensiles à l’ancienne s’entretiennent
de préférence avec des produits naturels : du sel, du citron ou de l’huile
par exemple, voire un peu de savon noir. Beaucoup plus efficace, économique et
écologique que le liquide vaisselle !
Avantage n° 4 : on fait de la meilleure
cuisine
Le principal dans un Donjon de Sorcière ! L’avantage à avoir une batterie composée de matériaux variés est
que chacun conduit et restitue différemment la chaleur, ce qui permet d’adapter
chaque matériau à un usage optimal : frire, faire bouillir, mijoter… On réalise des cuissons plus précises, plus respectueuses des aliments, et c’est
tout simplement meilleur dans l’assiette ! Je reviendrai plus en détail
sur les utilisations propres à chacun dans les billets qui leur seront dédiés
mais par exemple :
La
tôle d’acier (fer)
monte très vite en température. C’est une matière parfaite pour saisir et
griller les aliments à des températures élevées que les poêles en
fer supportent très bien : idéal pour obtenir des viandes avec une
croute dorée et un intérieur saignant par exemple. Essaie d’obtenir le même
résultat avec une poêle Teflon : rien à voir !
À l’inverse, les ustensiles en fonte avec leurs
parois/fonds épais sont très bien pour des cuissons douces et très longues. Les
plats mijotés y trouvent évidemment leur compte, de même que les grosses pièces
de viandes qu’on peut confire longuement sans les dessécher. On retrouve le
même avantage pour les confitures faites dans les bassines en cuivre qui
restituent la chaleur de manière très homogène.
Les cocottes en fonte, qui vont sur le feu comme
au four, ouvrent aussi de nouvelles possibilités très intéressantes en
combinant les deux propriétés : par exemple, faire dorer une viande sur le
feu direct puis la confire au four à chaleur douce dans le même récipient
contenant les sucs grillés savoureux.
Je te recommande au passage cet article très pertinent de Marie-Claire sur son blog Du miel et du sel.
Je te vois venir : c’est trop beau tout ça,
il doit bien y avoir des inconvénients ! Je t'accorde qu’il y en a
un vrai, et une idée reçue.
Le vrai inconvénient : le poids
Les poêles
en fer et les cocotes en fonte pèsent… Lourd. C’est bon pour les biscottos cela
dit. La grande poêle vide pèse 2 kg, imagine-toi essayer de faire sauter une
crêpe : à moi les biceps de Conan !
L’idée reçue à oublier : les ustensiles non
revêtus attachent et sont pénibles à récurer.
C’est ce que je pensais avant de les essayer. En
réalité, les matériaux bruts attachent très peu. Pour l’entretien, il est aussi
– voire plus – facile d’entretenir ses ustensiles à l’ancienne que leurs
versions modernes : pas besoins d’huile de coude (juste d’un peu
d’huile végétale !), ni de détergent, voire pas d’eau non plus, hé
oui !
Ce n’est pas compliqué à utiliser, c’est
différent, il faut juste connaitre quelques astuces et prendre de nouvelles
habitudes. Et comme il y a beaucoup à dire, je t’en parlerai dans une série de
prochains billets détaillant pour chaque matériau quelles sont leurs
propriétés, comment les utiliser et les entretenir.
À suivre :